Bruno Procopio a été interviewé par Le Monde sur l’économie du disque classique.

Faire preuve d’inventivité

Si les artistes se donnent tant de mal pour enregistrer des disques qui leur rapportent si peu, c’est parce que le disque permet d’accéder à la reconnaissance des médias et des professionnels – mais aussi d’ouvrir les portes des salles de concerts. « Après avoir enregistré avec l’orchestre symphonique Simon Bolivar, j’ai pu ouvrir la saison avec l’orchestre Lamoureux au Théâtre des Champs-Elysées et diriger plusieurs orchestres renommés, explique le claveciniste et chef d’orchestre Bruno Procopio. Jamais je n’aurais pu le faire sans cet album, qui m’a lancé. »

Vente à perte

Certains musiciens vont même jusqu’à créer leur propre label. « Pour vivre de ma musique et enregistrer mes disques, j’ai décidé de créer mon propre label, Paraty, poursuit Bruno Procopio. Pour le faire vivre et étoffer le catalogue, il me fallait aussi produire des disques d’autres musiciens. Pour moi, le but est de changer le rapport des artistes à leurs disques – afin qu’ils n’en soient pas seulement les interprètes, mais aussi les propriétaires. » Dans un système classique, la maison de ­disques est propriétaire de la bande-son comme du produit fini. « Si elle décide de ne pas le rééditer, impossible pour l’artiste de ­récupérer le master et de l’éditer ailleurs, ­explique Bruno Procopio. Le deal avec mon label est différent : les musiciens financent le master, qui leur appartient, et moi, j’en suis l’éditeur – et je diffuse leur album via mon distributeur, Harmonia mundi. » Une fois les stocks épuisés, les musiciens ont la possibilité de rééditer leur album en passant un nouveau ­contrat avec le label – mais ils peuvent aussi le faire ailleurs. Ils peuvent également acheter leurs disques au label au prix coûtant de fabrication – soit quelques euros – pour les revendre après leurs concerts.

Dans la mesure où la durée de vie d’un disque dans les rayons de la Fnac n’excède pas quelque mois et où le disque n’est proposé qu’à quelques exemplaires, il appartient en effet aux musiciens d’acheter et de revendre une partie de leurs albums.

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